Protection juridique de la palme d’or
Un hôtel, la ayant adopté thématique du cinéma pour sa décoration, a été poursuivi pour contrefaçon de la palme d’or du festival de Cannes. En défense, l’hôtel a fait valoir sans succès que la palme d’or n’est pas un élément suffisamment distinctif dans la mesure où il s’agit d’un emblème faisant partie de la culture judéo-chrétienne, largement répandu dans le domaine public et utilisé couramment par d’autres marques. Les juges ont retenu que le dessin de la palme était parfaitement arbitraire et de fantaisie par rapport à une feuille de palmier qu’il est censé illustrer. Le graphisme de la palme n’encourt donc pas le grief allégué de défaut de distinctivité.
Usage sérieux de la marque
Il est établi que le titulaire de la marque (AFFIF) n’exploite pas une seule fois par an à l’occasion du Festival de Cannes, la marque en cause mais tout au long de l’année à travers des partenariats privés. Pour justifier du caractère sérieux de l’usage de la marque, l’AFFIF a produit des correspondances concernant la réservation de chambres d’hôtel à Cannes, une carte menu bar de la Plage des Palmes, formulaire de réservation de déjeuner, et flyer de présentation des cocktails et petits déjeuners, sur lesquels apparaissent le graphisme de la palme tel que déposé, ainsi que des bars éphémères des partenaires Nespresso et Orange.
Contrefaçon par imitation
Au regard d’une appréciation des degrés de similitude entre les signes et entre les services désignés par la classe 43, il existe un risque de confusion dans l’esprit du public concerné, ce risque de confusion devant être apprécié en tenant compte de tous les facteurs pertinents du cas d’espèce. L’appréciation de la similitude visuelle et conceptuelle des signes doit être fondée sur l’impression d’ensemble produite par ceux-ci, en tenant compte, notamment, de leurs éléments distinctifs et dominants.
Il ressort de la comparaison des signes en présence que d’un point de vue visuel, les palmes relevées par l’huissier dans son procès-verbal sont très proches et leur forme évoque sur le plan intellectuel nettement la représentation de la palme figurant sur les marques de l’AFFIF. Il s’agit en effet d’une palme qui comporte 20 feuilles ondulées, dont l’épaisseur du trait et la forme sont similaires. En effet le fait qu’une feuille ait un sens opposé, que le mouvement de l’ondulation qui reste dirigée vers le haut soit légèrement différent, avec un embout plutôt carré sont insignifiants pour le public qui n’a pas les deux signes sous les yeux.
Les services fournis par le défendeur sont ceux d’un hôtel, qui entrent dans la catégorie des services de la classe 43 à savoir « hébergement temporaire, services hôteliers et réservation de logements temporaires » qui sont visés dans l’enregistrement des marques du festival de cannes.
La reproduction d’une palme proche de celle constituant les marques, qui protège la palme d’or du Festival de Cannes, de couleur jaune notamment sur un tapis rouge, évoquant les marches du palais du Festival, par un hôtel dont la décoration a pour thématique le cinéma et la recherche de liens avec l’univers du 7ème art et ses célébrités, révèle que le défendeur a fait ce choix dans le but d’attirer une clientèle sensible à cet événement et à la marque qui lui est étroitement liée.
Il s’agissait d’ajouter un détail évocateur de plus au thème de la décoration de l’hôtel ce dont la presse s’est fait l’écho, en commentant « un tapis rouge jonché de palmes d’or vous accueille comme à Cannes, vous êtes la star d’un soir » pour un public qui ne concerne pas seulement la ville de Cannes, compte tenu de la notoriété du Festival qui n’est pas contestée.
Il résulte de ces éléments que la forte similitude entre les signes en cause pris dans leur ensemble alliée à la similarité des services entraîne un risque de confusion, le public concerné étant amené à attribuer aux services proposés par l’hôtel une origine commune ou tout au moins un partenariat avec le Festival de Cannes.
L’absence de mention du statut « partenaire officiel » n’exclut en rien le risque de confusion pour le public. La contrefaçon par imitation est ainsi caractérisée sans qu’il y ait lieu d’apprécier la bonne foi de l’hôtel fautif (30 000 € de dommages et intérêts).
TGI Paris 10 septembre 2015
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